Introduction au Svalbard ou Spitzberg
    
    Le Spitzberg en détail et guide pratique
Accueil ? Aller au Spitzberg ? À propos

GÉOLOGIE DU SVALBARD : comme un livre ouvert...


Le Svalbard est souvent décrit comme un livre de géologie car la plupart des roches couvrant les périodes du Précambrien au Quaternaire y sont présentes, ainsi que des traces d'activité volcanique. L'absence de végétation permet d'accéder très facilement à la roche mère dans beaucoup d'endroits et facilite ainsi le travail des géologues. En revanche, les glaciers et les calottes polaires cachent une bonne partie de la structure du sol.

Voyage Spitzberg : Glacier en Baie de Monaco
Svalbard : Glacier en Baie de Monaco

Spitzberg : Un socle précambrien battu par la mer

Grossièrement, le Svalbard est constitué d'une cuvette aux bords composés de roches anciennes et comblée en son milieu de roches sédimentaires plus récentes. Depuis le Précambrien, il a été très souvent recouvert par la mer, ce qui explique l'épaisseur des couches sédimentaires.
On trouve des roches tertiaires - moins de 65 millions d'années- plutôt tendres, dans les parties centrale et sud du Spitzberg. Ces roches ont été soulevées horizontalement sans être déformées, ce qui explique le relief « en terrasses » des massifs du Nordenskjöld Land. L'érosion glaciaire y a creusé des vallées en auge alors que les sommets sont souvent plats.
Les roches secondaires datent, elles, de 65 à 245 millions d'années, période au cours de laquelle le Svalbard s'est déplacé, selon la dérive des continents, de 50 à 70° Nord. Elles se trouvent sous la couche précédente et affleurent tout autour en surface, dans le Sud-Est et les îles de l'Est (Edgeøya, Barentsøya, Kong Karls Land) ; car à la fin du Crétacé, les mouvements de la croûte terrestre affectent le Svalbard, causant une compression est-ouest qui marque la côte Ouest (failles, plissements).
En dessous viennent des roches sédimentaires de la fin du Primaire (245 à 400 millions d'années), formant une espèce de ceinture émergeant à l'ouest et au nord des zones composées de roches jeunes. À l'ouest, cette ceinture, redressée au Secondaire, forme une bande très étroite parallèle à la côte. Les structures sédimentaires les plus marquées sont visibles dans Billefjord et Tempelfjord - diverticules de l'Isfjord - , où les couches se succèdent sur une hauteur de 600 mètres au-dessus du niveau de la mer.
La zone comprise entre Wijdefjord et Raudfjord, an nord de l'île, constitue un bloc à part, datant du Dévonien. Elle est principalement constituée de grès rouge et de schistes (au Dévonien, une subsidence affecte le nord du Spitzberg, accompagnée par une légère phase de plissement).
Enfin, le long de la côte ouest et dans toute la partie nord, des roches ignées et métamorphiques du Primaire ou Précambrien (plus de 400 millions d'années) forment un relief montagneux de type « alpin ». Elles proviennent du plissement calédonien au cours de l'Ordovicien-Silurien (dont on trouve des traces en Amérique et en Europe du Nord). Ce sont ces reliefs aux cimes acérées qui sont à l'origine du nom du Spitzberg (« montagnes pointues »). Les deux points culminants - les monts Newton et Perrier - sont constitués de ce type de roche.

Spitzberg : Failles et anciens volcans

Quelques grandes failles, le plus souvent parallèles à la côte ouest, ont favorisé l'érosion. C'est pour cette raison que beaucoup de fjords et de vallées sont orientés nord-sud.
En particulier, les roches dévoniennes sont encaissées dans un compartiment affaissé, né de l'orogenèse calédonienne, il y a quelque 400 millions d'années. C'est également au cours de cette orogenèse que les formations les plus anciennes on été plissées et métamorphisées et que des intrusions granitiques se sont mises en place dans le nord du Spitzberg et de la Terre du Nord-Est ; ce système de roches métamorphiques et ignées porte, au Svalbard, le nom de Hecla Hoek, car il est caractéristique du massif Heclahuken (côte nord-ouest du détroit d'Hinlopen).
Les premières traces d'activité volcanique au Svalbard remontent au Précambrien (Terre du Nord-Est) ; mais également, quelques intrusions de roches volcaniques (sills et dykes de dolérites noires) datant du Secondaire sont visibles. Ces intrusions, composées de roches plus dures que celles qui les encadrent, forment un ressaut sur les pentes, par exemple dans Sassendalen, entre Longyearbyen et le fond du Storfjord.
On note également des épanchements de lave basaltique (orgues hexagonales) dans le Kong Karls Land. Quoique modeste, l'activité volcanique du Svalbard s'est poursuivie jusqu'à notre période géologique, le Quaternaire.
Dans le Nord, autour du Bockfjord - branche du Woodfjord -, trois sources volcaniques ont émergé. L'érosion a effacé une partie des volcans si bien qu'on ne peut évaluer leurs dimensions originelles, l'âge supposé se situant entre 70 000 et 130 000 ans. Il existe également quelques sources d'eau chaude (environ 25°C).

Voyage Spitzberg : Les montagnes du Bockfjord
Svalbard : Les montagnes du Bockfjord

De rares minéraux trouvés au Svalbard sont parmi les plus vieux du monde : des grains de zircon, enclavés dans un granite, datés de 3,2 milliards d'années. Il faut se rappeler que les roches terrestres les plus anciennes proviennent du vieux socle nord-américain et groenlandais, auquel le Spitzberg est longtemps resté accolé, avant d'en être séparé par l'ouverture de l'Océan Arctique.

Voyage Spitzberg : l'Île aux Ours
Svalbard : L'Île aux Ours

Spitzberg : Un relief du plateau continental eurasiatique

Le Svalbard fait partie de la plate-forme continentale eurasiatique et en est le dernier prolongement. La mer de Barents, qui sépare le Svalbard de la Norvège et de la Nouvelle Zemble, est très peu profonde, en général de 200 à 400 mètres.
D'après la théorie de la tectonique de plaques, le Svalbard s'est déplacé des zones équatoriales vers les tropiques, puis les zones tempérées et enfin le pôle. La présence de nombreux fossiles animaux et végétaux dans les couches sédimentaires confirme cette hypothèse. Avant l'ouverture de l'Océan Glacial, la Svalbard était proche du Nord du Groenland et de la Terre d'Ellesmere au Nord du Canada.
Plusieurs traces de dinosaures ont été retrouvées, datant d'environ 120 millions d'années (début du Crétacé). On pense que le Svalbard était à environ 60° de latitude à cette époque et le climat devait être plus doux qu'actuellement, à latitude équivalente. En effet, la position actuelle du Svalbard ne permet en aucune façon à une végétation de se développer au point d'accumuler des couches de charbon allant jusqu'à plus d'un mètre d'épaisseur.
Parmi les fossiles retrouvés au Spitzberg on peut notamment remarquer des empreintes d'iguanodon (grands reptiles herbivores)sur la côte ouest et d'allosaures (carnivores, dont les traces de pattes atteignent 30 centimètres) sur la côte est, datées d'environ 120 millions d'années. Dans Sassendalen, non loin de Longyearbyen, les paléontologues ont également étudié des restes d'ichtyosaures (reptiles marins du Trias).
Et sur l'Île aux Ours, le squelette quasi complet d'un stégocéphale (grand amphibien) mort ici il y a plus de 200 millions d'années, a été mis au jour. Autant de maillons de la longue évolution de la vie, qui permettent de comprendre comment nos prédécesseurs ont conquis la terre.
On a également retrouvé des poissons cuirassés du Silurien-Dévonien dans les dépôts tranquilles de cette ère, et des stromatolites précambriens (de stroma, tapis et lithos, pierre) : ces sortes d'empilements calcaires ont été laissés par des algues bleues primitives et sont les premiers vestiges de la vie terrestre.
Les traces de flore attestant de climats totalement différents de celui que l'on connaît au Svalbard aujourd'hui (Corylus, Metasequoia...) et de faune passées (trilobites, bivalves, ammonites...) - souvent formées dans d'anciennes lagunes côtières - peuvent ici, être retrouvées par de simples randonneurs.
La richesse de la palette géologique du Svalbard, organisée en une cocarde de roches où toutes les grandes ères affleurent est telle que l'archipel est souvent considéré comme un véritable « manuel de géologie ouvert », ou encore comme le « paradis des géologues » ; et certains détails sont mal représentés ailleurs en Europe du Nord.
Les premières expéditions géologiques dans ce massif arctique datent du 19ème siècle, avec les études du Norvégien Baltazar Keilhau (1827).

Sources : L'Arctique et l'environnement boréal (Collection Autrement dit, CNDP).
En voyage au Spitzberg, Terre Polaire (C. Kempf).
Spitzbergen (A. Umbreit).
Spitzbergen - Svalbard (R. Stange)
Svalbard-Spitzbergen Guide (Pål Hermansen)