Introduction au Svalbard ou Spitzberg
    
    Le Spitzberg en détail et guide pratique
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L'HISTOIRE DU SVALBARD


Les « chasseurs de Pôles »

Depuis l'époque de sa découverte, des centaines d'expéditions se sont déroulées au Svalbard. Certaines pour venir étudier cette région arctique ; d'autres pour partir à la conquête du Pôle Nord depuis cette dernière terre ferme, en raison de la proximité du Pôle et de sa côte Ouest dégagée de glaces en été.
En particulier, le Spitzberg attira les prétendants à la conquête du Pôle par la voie des airs, constituant ainsi l'une des bases de départ essentielles : l'ingénieur suédois Andrée avec son ballon Oern (l'Aigle) dès 1896, puis, plus tard, l'Italien Nobile et ses dirigeables, le Norge en 1926 et l'Italia en 1928. Sans oublier bien sûr les inconditionnels des vols polaires en avion, comme Ellsworth, Byrd et Amundsen, déjà héros du Pôle Sud. Si certaines des ces expéditions furent tragiques, d'autres se contentèrent d'être cocasses.

Le dirigeable Norge en 1926
Ny-Ålesund, le pylône d'arrimage utilisé pour les dirigeables Norge et Italia

La première tentative remonte à la fin du 18e siècle : l'expédition de l'anglais Phipps, en raison de conditions de glaces difficiles, n'atteindra, en 1773, que les îles Sjuøyane et 80°37'N.
En 1827, Parry, un autre anglais, parviendra à la latitude de 82°35'N. Par la suite, il s'est avéré que les courants marins contraires du Nord de l'archipel rendaient illusoire toute tentative d'atteindre le Pôle à pied par la banquise.
Le suédois Nordenskjöld tentera sa chance en 1873, après un hivernage dans la Mosselbukta au Nord du Spitzberg, mais le manque de provisions et la fuite des rennes prévus pour tirer les traîneaux l'obligèrent à abandonner son projet.
En 1894 le journaliste et aventurier américain Wellman se heurtera à une banquise très compacte au Nord de Sjuøyane et verra son bateau broyé par les glaces devant Waldenøya.

Au début du 20e siècle, l'objectif d'atteindre le Pôle par les airs était au goût du jour et le Svalbard était en bonne position pour servir de point de départ à ces raids, mais pour entreprendre une longue exploration aérienne, le dirigeable paraissait plus sûr que l'avion, dont l'autonomie restait limitée.

En 1896, le Suédois Andrée tente de rejoindre le Pôle Nord en ballon. Il installe un camp de base sur l'Île des Danois (Danskøya). La météo n'étant pas favorable, il doit abandonner.
Il revient l'année suivante beaucoup plus tôt dans la saison. Le 11 juillet, après 20 jours d'attente, le vent souffle enfin du Sud-Sud-Ouest. À 13h46 le ballon est lâché avec trois hommes à bord : Andrée, Strindberg et Fraenkel.
Le 12, dès les premières heures, le ballon plonge dans le brouillard et reste à moins de 100 mètres d'altitude. Il touche la glace la première fois vers 82° de latitude. Le givre recouvre peu à peu le ballon qui tombe définitivement sur la glace à prés de 83°N, le 14 juillet à 7h30, soit après 65 heures de vol. Les trois hommes tentent de rejoindre un des dépôts de nourriture, mais doivent se résigner à suivre les mouvements de la banquise. Après deux mois de dérive, ils arrivent en vue de l'Île Blanche (Kvitøya). Le bloc de glace sur lequel ils s'étaient réfugiés explose le 2 octobre. Ils doivent s'installer sur l'île pour hiverner, mais meurent rapidement. La date et la raison exacte de leur mort ne sont pas connues : on suppose qu'elle est due à une intoxication alimentaire après avoir probablement consommé de la viande d'ours blanc contaminée par la trichinose.
Ce n'est que 33 ans après, en 1930, qu'un bateau chassant le phoque découvre par hasard les restes de l'expédition : cadavres, carnets de bord, plaques photographiques intactes, matériel d'expédition, instruments... Leur aventure est ainsi révélée au monde.

En 1906 on retrouve l'américain Walter Wellman, qui installe son camp de base à l'extrême Nord du Spitzberg sur l'Île aux Danois (Danskøya), ainsi nommée par les anciens baleiniers. Son but : atteindre le Pôle - comme Andrée qui passa également par ici - à bord d'un aéronef à moteur de fabrication française, l'America. Hélas, en 1909, au cours d'une troisième et dernière tentative, le guiderope de l'appareil casse au bout de 50 kilomètres ; l'America est récupéré par un bateau norvégien ainsi que tout l'équipage et ramené à Virgohamna. Wellman retourne à Tromsø, abandonnant là ses aventures arctiques, d'autant plus que l'on vient d'apprendre qu'entre-temps Peary et Cook auraient atteint le Pôle Nord depuis le Canada...
En 1993, les vestiges du Camp Wellman, très visité par les touristes, ont été étudiés afin de mieux connaître le déroulement de ce drame. Sur l'île, un nom préserve le souvenir de ces héros polaires oubliés : Wellmankollen, la Colline Wellman...

En 1910 l'expédition du comte Zeppelin fait ses preuves de navigabilité avec le dirigeable Mainz dans le Kongsfjord et le Krossfjord.

Près de trente ans après Andrée, l'ingénieur italien Umberto Nobile construit le Norge (la Norvège), un appareil de 19000 m3, capable de soulever 23 tonnes et possédant un rayon d'action de 8 000 kilomètres. Il se rend à Ny-Ålesund, d'où il décolle le 11 mai 1926 pour le Pôle ; à son bord, en compagnie du Norvégien Amundsen et de l'Américain Ellsworth, Nobile réussit à survoler le point mythique, larguant les trois drapeaux de l'expédition, et à rallier l'Alaska après 72 heures de vol.
Après le vol du Norge, dont le succès fut attribué à Amundsen ou à Nobile suivant que l'on soit en Norvège ou en Italie, le dictateur Mussolini veut une victoire uniquement italienne. En 1928, un nouveau dirigeable, l'Italia, est acheminé à Ny-Ålesund. Au cours d'un vol de reconnaissance, les Terres du Nord, la Nouvelle-Zemble et l'archipel François-Joseph sont survolés. Le 23 mai, il atteint le nord du Groenland, puis le Pôle. Le dirigeable est pris dans le brouillard au retour. Alourdi par le givre, il tombe à son tour sur la banquise.
On déclenche alors la plus grosse opération de secours jamais organisée : 1500 hommes en provenance de sept pays, 21 avions et 16 bateaux. La France prête un hydravion Latham. C'est à bord de cet appareil que disparaît Roald Amundsen le 29 juin entre Tromsø et la Baie du Roi. Finalement un SOS sera capté depuis un campement sommaire installé sur la banquise ; Nobile, blessé, sera évacué par avion et le reste de l'équipage recueilli par le brise-glace soviétique Krassin.

Le 21 mai 1925, Roald Amundsen et Lincoln Ellsworth, qui se sont aussi distingués en Antarctique, embarquent à bord de deux hydravions Dornier-Wal. Partis de Ny-Ålesund, ils doivent amerrir à près de 88° de latitude Nord, dans un trou d'eau de la banquise. Ils se battent pendant 24 jours pour tailler au couteau une piste suffisamment dégagée pour permettre à un seul hydravion de décoller.
L'année suivante, Roald Amundsen se trouve à Ny-Ålesund avec Nobile lorsqu'ils voient débarquer l'Américain Richard Byrd (également explorateur de l'Antarctique). Celui-ci décolle le 9 mai à bord d'un biplan Fokker. Il rentre 16 heures plus tard après « avoir fait trois petits tours au-dessus du Pôle... ».
En 1928, Wilkins et Eielson à bord d'un avion Lockheed traversent l'Océan Arctique depuis Point Barrow jusqu'au Grønfjord, sur la côte Ouest du Spitzberg, en survolant le Nord de la Terre d'Ellesmere.

En mars 1982, quatre Espagnols veulent rejoindre le Pôle Nord à moto depuis Longyearbyen. Ils accrochent à leurs « 350 cm3 » des traîneaux de 500 kg. Partant de l'aéroport, ils peuvent descendre la pente menant au terrain de camping distant de 100 mètres, mais une fois rendus sur le plat, ne peuvent plus avancer d'un mètre...
Toujours en 1982, l'expédition Transglobe, conduite par Sir Ranulph Fiennes en provenance d'Ellesmere, est récupérée par leur bateau à 80°30', au Nord du Spitzberg après avoir traversé l'Océan Arctique en motoneige.
Huit femmes pour un Pôle est le titre d'un livre qui relate l'expédition de Madeleine Griselin, qui voulait rejoindre le Pôle Nord depuis le Spitzberg. Fin février 1986 elles se font déposer dans l'archipel des Sept-Îles (Sjuøyane), tout au Nord du Svalbard. Après une semaine, elles se font rapatrier in extremis, la banquise se disloquant autour d'elles.
Deuxième départ pour six d'entre elles le 24 mars 1986, mais depuis la latitude 83°33'N, la banquise étant trop disloquée ou absente plus au sud. Au bout d'un mois, elles sont encore à la même latitude, les kilomètres parcourus péniblement le jour étant annulés par la dérive au cours de la nuit, quand une tempête ne les ramène pas 100 kilomètres plus au Sud en moins de deux jours. Elles atteindront 84°14'N.

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